Récit étonnant d’un pélerinage à Notre Dame de La Salette en 1863

Récit d’un pélerinage à Notre Dame de La Salette en 1863

§.

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Cet article est donc le résumé d’un livre édité en 1863, intitulé  » Voyage de Grenoble à La Salette » écrit par E. de Toytot.  Ce livre m’a été transmis aimablement par M. Robert Faure ( écrivain du Champsaur) et je l’en remercie vivement. Il donne de nombreux détails sur le pélerinage en 1863 dont certains sont très surprenants……Je vous les laisse  découvrir…..

A la fin de ce récit vous avez des gravures assez rares sur ND de La Salette en 1863.

 

Récit d’un pélerinage en 1863.

 

« En arrivant de Grenoble après une longue route…..bientôt on aperçoit Corps à l’horizon. Ses maisons, groupées autour de l’église, s’adossent au pied d’une montagne boisée. Ce village reculé, cette montagne qui le protège, cette solitude et ce calme, les souvenirs qui s’y rattachent, tout jusqu’aux ombres du soir qui déjà commencent à descendre dans la vallée, donnent à cet aspect un charme inaccoutumé. On respire un délicieux parfum de paix et de douceur…… »

 

Corps 1863

 

L’arrivée à Corps.

 

« La route de Gap qui traverse Corps dans toute sa longueur, lui donne une rue large, aérée, spacieuse, presqu’une grande place. Je connais plus d’une ville importante qui n’en pourrait montrer autant. Cette rue au reste, est presque toujours occupée par les voitures qui partent ou qui arrivent; des mulets stationnent avec leurs guides; des bagages encombrent la voie; les pélerins s’embarquent ou débarquent, ce qui n’est pas dans les deux cas une petite affaire. »

 

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« La Salette est ici le point de contact qui unit voyageurs et hoteliers; elle est la raison d’être de tout ce mouvement. On n’est point étonné de trouver ici …..l’hotel de La Salette, au rendez-vous de La Salette,guides pour La Salette……Si vous n’êtes pas disposé à entreprendre immédiatement l’ascension de la montagne, vous pouvez sans crainte vous arrêter ici et y passer la nuit. Et demain reposé et dispos, vous partirez avec l’aurore ; ainsi font beaucoup de pélerins. »

 

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« Cependant pour peu que vous ayez trois heures devant vous et un temps passable, laissez moi cher lecteur vous donner un conseil. Gravissez ce soir la montagne; vous n’en serez pas plus fatigué……et vous aurez le temps encore de vous agenouiller au bord de la fontaine de l’apparition et d’assister à l’office du soir.

Pour moi la nuit passa rapidement dans le village de Corps. J’avais hâte d’arriver au but de mon voyage. J’étais sur pieds à trois heures et demi…peu après, l’aube blanchissante laissait apercevoir sur la grande place de Corps, des mulets avec leur guide, attendant tout caparaçonnés le départ; quelques pélerins matinaux comme moi, étaient prêts à partir; les dames seules se faisaient attendre; elles vinrent cependant et escaladèrent non sans peine et quelque frayeur, au moyen d’escabeaux à cet usage, les excellents animaux qui devaient leur servir de véhicule. Il n’y a au reste pas d’autre moyen pour monter à La Salette….si ce n’est la marche à pieds. »

 

La grande montée vers La Salette.

 

« En sortant de Corps, on laisse à gauche la route de Grenoble; sous les sentiers ombragés d’un jardin anglais, on s’engage dans une allée étroite au fond de laquelle roule encaissé un joli ruisseau…..une nature luxuriante, des arbres pleins de sève, un torrent abondant et fécond au pied même de ces monts arides……. »

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 » Bientôt on descend au fond de la gorge, on traverse le ruisseau pour en longer quelques temps la rive droite. Un petit pont rocailleux, aux pierres moussues et disjointes, laisse passer l’eau frémissante du torrent…..Là s’élève une humble chapelle : c’est Notre Dame du Gourmier. Ce modeste sanctuaire sert de limite au territoire de Corps. C’est aussi la premiere halte des pélerins de La Salette. Déjà, malgré l’heure matinale, de pieux visiteurs étaient agenouillés sur les degrés de l’oratoire…..avec Ave Maria, ils mettent sous la protection de la Madone la journée qu’ils allaient lui consacrer. « 

« A partir de la chapelle, les pentes s’inclinent d’avantage. »

 

Pélerinage La Salette-copie-1

« Les sentiers deviennent escarpés.Tout va bien en commençant; les jambes sont alertes, le coeur allègre, le soleil se lève radieux……Pauvre voyageur si confiant et si dédaigneux de la fatigue, vous n’aurez pas franchi  la moitié de la montée que déjà vous sentirez votre poitrine oppressée et haletante……..En attendant, l’horizon se rétrécit: la perspective devient plus sévère, le plateau plus âpre et plus grandiose. Une rampe taillée dans le roc serpente sur le flanc de la montagne, laissant apercevoir à chaque pas, sur le mur de granit, la trace non effacée de la mine ( explosif ) qui seule a pu vaincre ces roches. A gauche, des blocs immenses s’avancent en surplombant nos têtes ; le défilé semble à chaque pas se fermer entre les rochers et le précipice. A droite, l’oeil se plonge avec délices dans les profondeurs de la gorge sauvage…….

 

Puis dans un étroit amphithéâtre tapissé de verdure et d’arbustes ( dessin de droite, au dessus), l’eau descend bondissante sur des gradins de granit mollement arrondis……

Nous avons tourné la montage. L’amphithéâtre des forêts s’est abaissé; nous voici dans une région moins sévère et moins âpre. Cà et là quelques champs cultivés, puis quelques maisons groupées autour d’une pauvre église : c’est la Salette Fallavaux. »

 

 

Nous arrivons à La  Salette Fallavaux.

 

Pélerinage Notre Dame de La Salette 1852Village de La Salette-Fallavaux en 1863. Au sommet de la montagne une croix indique le lieu de l’apparition.

 

« La Salette ! voilà donc le nom à jamais mémorable. Cette commune renferme treize hameaux. Le Sanctuaire se trouve plus haut dans la montagne,à huit kilomètres…..Un petit oratoire s’élève au pied de Fallavaux, sanctuaire vénéré souvent fréquenté par les habitants de la montagne, et attestant qu’avant même l’apparition ils n’étaient pas sans foi et sans prières.

Il faut laisser à droite la route de La Salette Fallavaux, et prendre de préférence le chemin qui mène aux Ablandins. Un sentier escarpé grimpe entre deux rangées d’arbres…..quelques pas et nous voici au village des Abladins : humbles et tristes masures, ruelles étroites et humides, toits de chaume noircis par la neige. Là encore s’est élevée une petite chapelle dont le campanille de cuivre resplendit aux rayons du soleil. Pauvre village, riche lui aussi de son nom et de ses souvenirs ! Tout le monde ici vous dira l’histoire des deux bergers qui demeurèrent aux ablandins : presque tous les ont connus. »

 

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Présentation des enfants. (la présentation du livre étant trop longue, il s’agit d’une présentation personnelle). 

 

 Ce sont deux enfants, Mélanie Calvat (14 ans) et Maximin Giraud (11 ans) qui ne se connaissaient pas au préalable,  qui vont être témoins de l’apparition du samedi 19 septembre 1846.

Maximin habitait Corps. Il se retrouve à La Salette le 18  septembre 1846 car un habitant du hameau des Ablandins (appartenant à La Salette), Pierre Selme, avait besoin de lui. Il avait demandé à son père de lui prêter Maximin quelques jours pour garder son troupeau de quatre vaches. Le père avait répondu « Mémin berger ? il est bien trop étourdi pour ça ! ». Puis finalement avait accepté. Maximin part donc avec sa chèvre  et son chien Loulou  pour les Ablandins.

 

Maximin Giraud et mélanie Calvat

Maximin et Mélanie

 

Mélanie habite La Salette Fallavaux et garde elle aussi un troupeau de quatre vaches. On peut retenir d’elle qu’elle avait un fort caractère et on dit même qu’elle avait un certain « franc-parler ». Elle changera du tout au tout après l’apparition selon le témoignage de son entourage.

Ils se rencontrent la veille des apparitions et décident de garder leurs troupeaux ensemble le lendemain. Maximin avait-il besoin d’être guidé dans la montagne ? Avait-il besoin d’être aidé dans sa nouvelle mission de berger ? Probablement.

Anecdote sur Maximin ( résumé du livre) .
« Maximin est naturellement à La Salette, l’objet de la curiosité et de la sympathie générale; chacun l’intérroge et le questionne : rien de mieux. Mais pourquoi certaines sollicitudes féminines ( sic) s’obstinent-elles à considérer sa personne comme une relique vivante devant laquelle aucune obséquiosité n’est de trop ?
Une année je me trouvais à La Salette en même temps que Maximin. Quelques dames s’étaient emparées de lui, lui rendant à l’envi un culte que celui-ci paraissait au reste trouver fort déplacé. On voulait lui baiser les mains. Une de ces béotiennes dont les allures, assurément fort rares à La Salette, révélaient une origine toute parisienne, tenait par-dessus tout à avoir de ses cheveux.
– Mais je ne suis pas encore canonisé, répondait Maximin en riant; attendez au moins ma mort.
Une autre sollicitait quelques mots de son écriture. Maximin refusait impitoyablement, disant qu’il ne prodiguait pas ainsi ses autographes.
Tout ceci  ne serait que risible , si c’est enfantillages aux yeux de certaines personnes n’avaient le tort de jeter du ridicule sur l’apparition elle-même…… »

Tout en parlant des deux bergers ( Maximin et Mélanie) , « nous voici loin des Ablandins.Nous arrivons au bord d’une fontaine dont les eaux claires et limpides, comme celles qui descendent des montagnes, invitent à la halte. Les mulets ne se font pas prier pour s’arrêter en cet endroit. »

 

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 ….. l’entrepreneur a tarifé 3 francs chaque course de mulet; le guide retire généralement 50 centimes…….

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« Ce sont d’excellents animaux…..fidèles à leur maître, dévoués à leur cavalier, intrépides, patients, laborieux dans le danger……Ils sont comme cela trente mulets à Corps, accomplissant chaque jour, sans repos ni trève, le rude et monotone labeur de deux voyages à la montagne, en tout, aller et retour, quatre courses.A ce rythme, au bout de cinq ans, leur carrière est finie. Il est vrai qu’à chaque mulet est attaché un guide, homme ou femme, qui fait ni plus ni moins que lui le même nombre d’ascensions périodiques. Mulets et guides appartiennent à un entrepreneur qui loue aux voyageurs le service de l’un et de l’autre. L’entrepreneur a tarifé 3 francs chaque course de mulet; le guide retire généralement 50 centimes……. »

Il est six heures du matin: nous arrivons à Dorsières.

 « Un soleil radieux illumine toute la montagne; l’air est doux; le ciel de feu au levant, d’azur au couchant, n’a pas un nuage.
Au dessus de nos têtes, voici encore un village suspendu aux flancs de la montagne. C’est Dorsières dont il faut emporter l’ascension ni plus ni moins….. »

 

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« Vu de loin, ce village est composé de véritables chalets, pittoresques et gracieux, que je comparerais volontiers à ceux de l’Helvétie classique. Approchez, pénétrez dans cet oasis: l’illusion s’est évanouie; la chaumière de vos rêves a disparu; les chalets sont des granges ternes et vulgaires. Il n’y a plus qu’un village noir, humide et sale, où abonde le fumier. Ce village c’est Dorsières. Mais on vous dit que c’est le dernier hameau de la montagne, le plus rapproché par conséquent du terme de votre pélerinage, et cette considération vous rend indulgent.

Un sentier à droite donne accès dans un pays plus âpre et plus sauvage.Nous traversons bientôt le torrent du Gargas…. »

 

Le début de la grande montée vers le Sanctuaire.

 

« Cinquante pas plus loin, il faut dire adieu aux champs cultivés…Un carré de choux et quelques arbustes marquent ici l’extrême limite de la conquête humaine sur le sol de la montagne. »

 

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 Le groupe sort des Dorsières……derniers champs cultivés.

 

 

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« La pente se fait raide……mon compagnon haletant s’essuyait le front et ne m’écoutait plus. J’essayais par moment d’abréger la distance et de couper à pic la pente escarpée, au lieu d’en suivre les lacets sinueux. Vingt fois l’expérience m’avait prouvé qu’on ne gagnait à cet exercice à cet exercice qu’un surcroît de fatigue, quelques chutes et beaucoup de retard. »

 

Après le torrent du Gargas, deux voies conduisent à La Salette…… 

 

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La première est la plus rapide, quoiqu’un peu pénible: c’est celle que suivent les animaux et les bêtes de somme. Le plus souvent elle côtoie le précipice.

 

L’autre voie pour arriver au plateau de l’apparition est moins sauvage et moins ardue. Les Pères de La Salette l’ont créée pour l’usage de ceux qui gravissent à pied la montagne. On la nomme vulgairement « le chemin des pélerins ».

 

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 Le « chemin des pélerins ».

  

 « C’est à proprement parler le chemin du sanctuaire et du pélerinage. A travers de gracieux et perpétuels méandres, un sentier, je devrais  dire une allée de jardin anglais, contourne tous les dix pas la raideur des pentes. Dans cette solitude où tout porte l’empreinte de la paix et du calme, le coeur s’élève et franchit la distance. On voudrait, rapide comme la pensée, parvenir au sommet….Hélas le corps est là….Cependant nous tournons enfin un des mamelons qui dérobent la vue du Sanctuaire. Tout à coup apparaît à nos yeux, assise sur un des plateaux de la montagne, l’église Notre Dame de La Salette. »

 

Sanctuaire Notre Dame de La Salette (2)

 On remarquera sur ce dessin l’enceinte qui entourait le Sanctuaire en 1863 et qui n’existe plus.

 

« Elle est au dessus de nous, adossée aux pics qui la dominent, et comme protégée par eux. Elle s’élève radieuse, entre le ciel et ce coin de terre isolée, majestueuse et grandiose par sa solitude même. On oublie alors toutes les préoccupations et les sollicitudes humaines. »

 

Sept heures du matin

 

« Quelques pas encore et nous sommes au but ! Déjà nous avons dépassé les murs extérieurs du sanctuaire; nous voici devant la façade, sur le plateau béni….au milieu de la solitude profonde, à 1804 mètres , s’étend sur une longueur d’environ 150 mètres un plateau silencieux. Aucun arbre, aucun arbrisseau ne viennent arrêter la vue dans ce lieu solitaire. »

 

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Les pélerins faisaient l’ascension « à jeun » ! afin de pouvoir assister  à la messe dès leur arrivée à 7h . Puis après cette messe matinale,  il allaient déjeuner . Avant Vatican II, c’était de cette façon dont il fallait procéder. Les pélerins assistaient ensuite à 10 h à la grand’ messe mais  ne communiaient pas une 2eme fois. ( le webmaster)

 

« Avant tout il faut aller s’agenouiller à la fontaine, au lieu même où Marie daigna parler aux enfants. Mais l’heure s’avance! Il est déjà sept heures. Hatons-nous de pénétrer dans l’église avant même de satisfaire toute curiosité. La nef est pleine; à tous les autels, des prêtres offrent le Saint Sacrifice; des pélerins en grand nombre se pressent autour des confessionnaux; d’autres, déjà réconciliés attendent avec ferveur le moment de la communion. »

 

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Alors que la construction de la Basilique n’est pas terminée, la messe a été dite pendant des mois dans le choeur de l’église, puis les palissades ont progressivement reculées pour laisser de plus en plus de place aux pélerins. On remarquera sur la gauche les nombreux confessionnaux où « les pélerins se pressent en grand nombre….. ».

« Mes compagnons et moi nous nous approchâmes de la sainte Table. Pour le pélerin croyant, y a-t-il un plus grand bonheur que de mettre sous la protection du Divin Sacrement les espérances et les prières de son pélerinage ?……je n’ai pas à narrer ( ici) les émotions de l’âme ni les ardeurs de la foi. Ces joies intimes, à quoi bon les retracer ? « 

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Dans le livre, l’auteur témoigne longuement de sa surprise en voyant la finesse des piliers. (Cliché 2010)

 

 

Huit heures du matin.

 

« En ce lieu, après une matinée radieuse, le ciel se couvre de nuages; un brouillard épais succède à la lumineuse clarté du soleil des montagnes; une pluie imperceptible et dense ne tarde pas à confondre dans une atmosphère nébuleuse les sommets des monts,les horizons naguère étincelants de lumière tout jusqu’aux objets les plus rapprochés. Malheur au voyageur qui gravit la montagne sous ce ciel inclément.A peine distingue-t-il le sentier derrière la croupe du mulet qui marche à deux pas de lui……Même à l’abri des murs de l’église, on subit la rude influence de l’atmosphère;…..un frisson glacial vous pénètre jusqu’aux os ».

Découverte des locaux avant le petit déjeuner. »

Basilique-Notre-Dame-de-La-Salette.jpg   La basilique vue de derrière en 1863. On remarquera le petit batiment sur la gauche qui n’existe plus.

 

« Quatre ailes immenses s’étendent à chacun des angles de l’église et forment autour d’elle une vaste hôtellerie dont les salles communiquent par de longs corridors.
photo couloir des voyageurs et des pélerins

L’aile gauche est occupée en partie par les prêtres missionnaires de La Salette. C’est dans ce corps de bâtiment que les pélerins, je veux dire les hommes, trouvent l’hospitalité. L’aile droite au contraire est réservée aux dames et occupée aussi par les soeurs de la Providence. Ce sont elles qui président aux soins de la maison, consacrant leur vie avec un dévouement et une intelligence admirables, jusque dans la saison la plus rigoureuse, aux besoins matériels des voyageurs et des pèlerins.
Après avoir inscrit nos noms et nous avoir montré nos chambres, un frère nous introduit  dans la salle des étangers. Là brûle perpétuellement dans un poêle de fonte un excellent feu que, même au mois de juillet, personne ne dédaigne. »

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C’est l’heure du petit-déjeuner.

 

« Nous trouvons au réfectoire nombreuse compagnie. Mais ici il y a toujours place pour les nouveaux venus. Les plus anciens leur font les honneurs de la maison, en sorte que les arrivants ne manquent de rien. Point de luxe : des murs blancs d’une propreté irréprochable; pour tout ornement, un grand crucifix au fond du refectoire. En revanche, une cordialité, une douceur, une politesse exquise, disons le mot, une charité qui n’a rien de commun avec des tables d’hôte habituelles. La conversation continuait vive, alerte, légère ; les récits succédaient aux récits, et le brouillard qui obscurcissait le jour de la salle basse ne paraissait nullement obscurcir les idées. »

 

Neuf heures.

 

« Le temps soudainement s’était éclairci, une vie nouvelle animait la nature: tout resplendissait de jeunesse et de fraîcheur.Nous visitons la fontaine bénie, jadis souvent desséchée, et qui n’a jamais tari depuis le jour où Marie a fait couler ses eaux. Un petit bassin  creusé dans le roc et une grille destinée à le protéger, n’en ont rien changé la disposition : on peut à travers les barreaux puiser sans difficulté l’eau vénérée. »

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Lieu de l’apparition et fontaine. 

 

 « Une chose surtout s’est conservée intacte: c’est la solitude du lieu et l’aspect agreste de cette montagne escarpée. On est frappé de cette pensée, que le grand évènement du 19 septembre 1846 ne pouvait s’accomplir sur une scène à la fois plus grandiose et mieux choisie, pour déjouer les projets de la supercherie et rendre vaines toutes les explications humaines. »

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Dix heures.

 

« La cloche de l’église retentit, annonçant aux pélerins le départ de la procession qui marque plus spécialement la solennité du dimanche. Je vis sortir de l’église un long défilé, dont les rangs allaient grossissant à chaque pas par l’arrivée de nouveaux fidèles. »

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 On remarquera la procession des pélerins qui part sur la droite et fait le tour du Mont Planeau pour revenir sur la gauche. Par ailleurs, c’est la première fois que je vois sur un dessin ( je le tenais d’une tradition orale) ,  la petite chapelle qui se trouvait en haut du lieu d’apparition construite en 1846. Une fois la construction de la Basilique terminée ( 1853) , cette petite chapelle a été déplacée plus haut, dans le cimetière des frères.

 

 

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Voici donc la fameuse chapelle construite en 1846 ( avant la Basilique qui date de 1852) sur le lieu même de l’apparition et qui a ensuite été déplacée plus haut, dans le cimetière des Pères. ( photo 2010)

 

« En tête marchaient les femmes, graves et recueillies, précédées de la bannière de La Salette portée par l’une d’elles. Puis venaient les hommes.Il y en avait de tout âge et de toute condition, paysans du Valbonnais ou de la Mateysine, pélerins éloignés, riches ou pauvres. Tous humbles, la tête nue sous le soleil ardent de la montagne, suivaient le pieux cortège, confondant dans une même prière le témoignage de leur foi; les Pères de La Salette fermaient la marche.

Mais tout cela n’est rien comparé au pélerinage du 19 septembre, jour anniversaire de la fête.( 1846-1863 : déjà 17 ans! ) Il faut voir ce jour-là, agenouillée sur la tête nue, la foule des pélerins accourus des extrémités de la France, on pourrait dire des extrémités du monde. La procession s’avance immense, majestueuse, solennelle, offrant au loin le spectacle d’un peuple entier uni dans la communauté d’une grande pensée…..allemands, Belges, anglais…… »

 

Mais voici l’heure de la messe.

 

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 L’intérieur de la Basilique ( photo récente mise en couleur sépia )

 

« La procession pénètre dans l’église; nous l’y suivons pour assister à la cérémonie et au sermon du dimanche. Dans le chœur, le long des stalles en chênes, sont agenouillés les prêtres de La Salette. Les Sœurs prennent place dans leurs bancs, à l’extrémité de la nef. Ce sont elles qui alternativement avec les Pères entonnent et soutiennent le chant des hymnes et des cantiques. »

 

MIDI moins le quart.

 

« La messe dite, je parcourus à loisir le sanctuaire. On sait que la première pierre en fut posée le 25 mai 1852, après le mandement doctrinale Mgr de Bruillard. Les constructions s’élevèrent rapidement. Le chœur servit d’abord d’église; puis successivement furent édifiées les nefs; toutes trois aujourd’hui terminées dans leur ensemble sont ouvertes depuis 1861 à la piété des pèlerins. Mais les deux flèches qui domineront l’église au dehors ne sont point encore commencées, ce qui ôte pour le moment au monument extérieur tout sentiment de grandeur et d’harmonie. »

 

 

MIDI.

 

« Les hôtes de La Salette se se rendent au réfectoire où les attendent, avec une prévenance toute charitable de soins et de services, les frères chargés de veiller aux besoins des étrangers. Un excellent potage…….

L’heure qui suit le dîner est l’heure de la promenade. Les Pères eux-mêmes prennent quelques instants de repos et se mêlent aux pèlerins.On se réunit par groupe. Les membres d’une même famille, divisés par l’inflexible séparation des logements de l’aile droite et de l’aile gauche, se retrouvent avec quelque charme……Certains gravissent le Gargas ou le Chamoux….les autres moins aventureux se contentent d’aller, à dix minutes de là, voir la carrière d’où on extrait la pierre des constructions…..d’autres enfin visitent les bâtiments…… »

 

Quatorze heures.

Le dimanche, les vêpres sont à quatorze heures.

 

Quinze heures.

« Un peu plus tard, un attrait tout nouveau appelle à la fontaine les pèlerins de La Salette. Un discours a lieu ( en semaine il a lieu à onze heures) . On s’assied en groupe sur le tertre gazonné; la foule occupe le sentier qui y mène; »

 

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 Procession le 19 septembre 1863 ( fête anniversaire ) sur le lieu de l’apparition. On voit très bien sur ce dessin la fameuse petite chapelle qui se trouvait dès 1846 sur le lieu de l’élévation de la Sainte Vierge.

 

 

« Le prédicateur, debout sur le lieu même de l’événement, il précise l’endroit où s’est déroulé le miracle; il le raconte, l’explique, le commente; il en fait l’histoire; il en développe les circonstances  et les résultats. Puis le écit teminé, il se met à la disposition de l’auditoire; il répond aux objections; il argumente au milieu de la foule attentive contre les sophismes et les erreurs. »

 

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L’après-midi jusqu’au soir.

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« Le reste de la journée s’écoule jusqu’au souper, au gré de chacun, en promenades, en causeries, en réflexions; puis viennent à huit heures l’exercice et les cérémonies du soir. »

 

Notre-Dame-de-La-Salette-copie-1.jpg  Procession dans les alpages. ( collection Robert Faure : 1880 ?)

 

Le Soir.

 

« C’est d’abord le chapelet récité en commun, c’est la prière du soir et le sermon où chaque jour dans un language admirable, plein d’enseignements et de vertus, sont commentés les textes de quelques-unes des paroles de la Sainte Vierge aux enfants.
La cérémonie du soir se termine par la bénédiction du Saint Sacrement et le chants du Salve Régina………dont les paroles retentissent à travers le silence de la nuit, au milieu de la solitude de la montagne.

Le samedi soir, une dévotion particulièrement touchante laisse l’église ouverte toute la nuit à la piété des fidèles. C’est l’adoration nocturne du Saint Sacrement. Il n’est pas rare de voir des pélerins, des femmes même, passer la nuit prosternés devant l’autel. D’autres se succèdent d’heure en heure, apportant ainsi sans interruption au coeur de Jésus offensé et souffrant l’hommage de leurs prières et de leurs supplications.

A neuf heures d’habitude la journée se termine.Le silence le plus complet ne tarde pas à régner. »

 

Le Départ.

 

« Mais déjà il nous faut songer aux préparatifs du départ. On règle avec le frère la note de son séjour; on emporte quelque souvenir de la montagne; on parcourt encore le chemin de la Croix tracé par Marie; on s’agenouille une dernière fois aux lieux vénérés; on recueille soi-même de l’eau de la fontaine. On prend congé des prêtres…….On dit adieu enfin aux douces heures écoulées, et on quitte, mais non sans un espoir de retour, le Sanctuaire vénéré ( Juillet 1863). »

 

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